Les numéros de Sosa

A quoi servent les numéros de sosa, quels sont leurs propriétés ? Comment un arbre généalogique se développe statistiquement de génération en génération ? Si vous vous posez ce genre de questions, j’espère vous apporter quelques réponses utiles à vos recherches...

La Généalogie est une science humaine avec une charpente mathématique qui peut procurer de l’indifférence, de l’ennui, de la curiosité, de l’attirance ou de la fascination. Je me classe dans la dernière catégorie.

Tout commence par la numérotation de nos ancêtres (plusieurs méthodes existent). La plus répandue se nomme Sosa-Stradonitz inventée au 16ème par Michel EYZINGER, mise au point par le franciscain et généalogiste Jérôme de SOSA en 1676 et reprise en 1898 par Stephan Kekulé von STRADONITZ.

Le principe est simple, la personne souche de l’arbre prend le numéro 1, son père le n° 2 et sa mère le 3. Puis on répète l’opération, chaque individu n° N aura pour père le numéro n° 2 x N et pour mère n° 2 x N +1 (qu’ils soient ou non connus du généalogiste).

Pour illustrer voici le tableau des sosa sur 4 générations ou degrés :

Ainsi, comme tout enfant a 2 parents, le nombre de sosas double à chaque génération. En itérant, le nombre de sosas de génération ou degré « d » se calcule par exponentielle de 2. Nous avons 2 (=21) parents, 4 (=22) grands parents …. à la génération 4 nous avons 16 (=24) ancêtres (voir tableau ci-dessus).

Nombre de Sosa sur la génération d = 2d

Exception du sosa numéro 1 souche, tous les garçons portent un numéro de sosa pair et les filles donc impair.

Pour calculer le nombre total d’individus sosas jusqu’à la génération « d », il suffit d’additionner 1 + 21+ 22 + 23+ … + 2d

Cette série mathématique singulière s’appelle une suite géométrique de raison 2 qui se résout par simple équation.

Nombre de Sosa cumulé jusqu’à la génération d = 2d+1 – 1

Ce dernier numéro qui clôt la génération est toujours réservé à la sosa mère de la lignée cognatique (de fille en mère). Le numéro d’après, le 1er de la génération suivante, est affecté au père de la lignée agnatique (de fils en père).

En résumant :

N° Sosa de la lignée agnatique (pères) de la génération d =  2d
N° Sosa de la lignée cognatique (mères) de la génération d =  2d+1 – 1

Illustration à la génération / degrés = 4 :

N° Sosa de la lignée agnatique de la 4ème génération =  24 = 16
N° Sosa de la lignée cognatique de la 4ème génération =  24+1 – 1 = 31

Le numéro de sosa contient beaucoup d’informations sur la filiation du sosa. Sur chaque génération d l’intervalle des sosas est compris entre [2d  , 2d+1 [.
Résolvons l’équation pour déterminer la valeur de la génération « d » d’un Sosa : Sosa >  2d  <=> d x ln(2) ≤ Ln (Sosa) <=> d ≤ Ln (Sosa) / ln(2)  
comme d est un nombre Entier, conservons sa partie entière « E() » :

Génération d (Sosa) = E(Ln (Sosa) / ln(2)) 

Pour les allergiques aux calculs, il suffit de se référer à une table des sosas par génération :

Vous avez peut-être besoin de connaitre la chaine entre un sosa choisi et votre souche :

  • Si le sosa est un homme, il est pair et il suffit de diviser par 2 pour trouver l’enfant sosa.
  • Si le sosa est une femme (sosa impair), il faut diviser aussi par 2 et supprimer le 0.5 de reste de la division.
  • En itérant d fois on détermine tous les sosas intermédiaires jusqu’à la souche

Voici un exemple :

Maintenant que tout le monde jongle bien avec les sosas et les générations, il est temps de s’intéresser aux arbres. La généalogie est magique, quand vous découvrez un sosa, il y en apparait 2 nouveaux de plus à trouver. C’est un puit sans fond, plus on trouve, plus il reste à chercher ! C’est ce que chaque généalogiste a ressenti quand il a démarré son arbre : 2 parents, 4 grands, …., 16 trisaïeuls. 

Puis les premiers blocages généalogiques apparaissent (une fille mère sans mari, un ancêtre qui a voyagé et dont on ne connait pas l’origine,… etc). En France, jusqu’à la révolution, la collecte des ancêtres est relativement facile (registres exhaustif, tables décennales, actif filiatifs et lisibles…). En passant aux registres paroissiaux, il commence à y avoir des gros trous et chaque génération gagnée représente une petite victoire. Nos branches les plus solides remontent jusqu’au début du 17ème siècle voir fin du 16ème (Période du début des registres vraiment filiatifs dans une majorité de commune). Sauf exception, la généalogie de registres ne dépasse pas l’ordonnance de Villers-Cotterêts de 1539 qui a rendu les registres obligatoires… A moins qu’en vous initiant à la paléographie vous cherchiez des informations complémentaires dans les plus anciens registres notariaux et les chartriers.

Si chaque arbre généalogique est différent, l’évolution des sosas par génération a souvent la même forme de cloche (illustration avec mes sosas) :

Quelques caractéristiques :
• Une montée exponentielle jusqu’à la moitié du 17ème siècle (génération 12 chez moi).
• S’ensuit une chute à la même vitesse.

Sur ma génération 6 je connais encore 90% de mes sosas, en génération 11 je n’en connais plus que 1 sur 2 et en génération 15 plus que 2% ! Chez moi, le premier degré de consanguinité (barre jaune) apparait en génération 6.

Certains se demandent peut-être ce qu’il se passe après cette génération 15 qui se situe vers 1550.

En montant vos générations, si vous avez un peu de chance, vous trouvez des bourgeois bien installés avec une belle situation financière qui réussissent à se marier avec une demoiselle de petite noblesse désargentée. A ce moment vous pénétrez le microcosme de la noblesse ou la consanguinité est la règle, et rapidement c’est toute la noblesse locale qui devient vos ancêtres. Et l’expérience se répète, un petit noble en pleine ascension sociale va épouser une demoiselle de noblesse supérieur et de fils en aiguilles vous tombez sur les comtes, barons puis vous finissez par être relié à toutes les têtes couronnées d’Europe .

Il y a aucune gloire à avoir des ancêtres nobles, c’est juste une réalité statistique qui s’impose à chacun de nous. Nous sommes tous les descendants de toutes personnes ayant eu une descendance ininterrompue de plus de 700 ans : les rois comme les pendus. La vraie difficulté consiste à trouver et à sourcer ces chemins vers nos personnages historiques (Saint Louis, Guillaume le Conquérant, Charlemagne …)

Voici le même graphique sur 30 générations (donc sur 900 ans) :

La belle bosse des générations 7 à 15 est devenue une modeste vaguelette. Vers 1200 (génération 27 chez moi) le nombre de sosas en doublon, à cause des consanguinités inévitables dans le temps, dépasse les nouveaux sosas. Il faut rester très prudent et critique, car les arbres anciens de nobles sont souvent des successions de recopies où les approximations dominent. Il existe donc beaucoup d’erreurs :

  • Les nobles portaient souvent les même prénoms donc il est très facile de confondre un oncle avec son neveu, 2 cousins homonymes…
  • Plus on remonte le temps plus les sources sont lacunaires voire douteuses.
  • Ces anciens arbres étaient parfois enjolivés car il était prestigieux de descendre d’un ancêtre très connu.
  • Les généalogies nobles devinrent des documents fiscaux vérifiés afin d’éviter les faux. En effet, être reconnu noble évitait de payer des impôts, dont la taille…


Je fais ma généalogie depuis 2013 et je sauvegarde régulièrement mes Gedcom. Cela me permet de vous montrer un développement d’arbre dans le temps.

Sans surprise la généalogie s’est développée très progressivement. J’ai eu besoin d’un an et demi pour commencer à me relier aux familles nobles anciennes. Et une fois que ce plafond de verre est percé, cela monte très rapidement en multipliant fatalement les erreurs il faut en être conscient.

Pour nos adhérents et abonnés que cela intéresse je mets à disposition un petit outil Excel (en cliquant ici) qui :

  • Calcule un chemin entre la souche et n’importe quel numéro de sosa
  • Calcule le graphique par génération de votre arbre sur Généanet


Bonnes recherches.

Thomas Gauthron